Donnez-leur du vent, ils en feront un moulin

Toute la mesquinerie de l’époque se résume dans ce mot : mais.

J’aime maisVous avez raison maisC’est juste mais

Contrairement à ce qu’il laisse croire, le mais ne marque plus une nuance dans une argumentation, un raisonnement mais plutôt, une absence totale de prise de position, une lâcheté crasse, une convenance sociale, un snobisme contemporain, un refus de cogiter, qui relègue les débats soit à des exercices d’acquiescements collectifs, soit à des bagarres de bouledogues affamés et drogués.

Dans les deux cas, à plus ou moins long terme, l’échange est suicidaire pour n’importe quel intervenant.


            

Le mais insuffle au mieux le doute dans l’esprit du spectateur, au pire la passivité. Quoi de plus beau qu’un mais pour mieux annihiler les positions de son adversaire, sans pour autant subir les affres de sa propre lâcheté ? Il ne complète jamais la réflexion, il l’annule. Simplement. Le mais est le dernier signe de soumission à l’opinion dominante, le cordon ombilical qui permet aux sceptiques, aux frileux, de rester encore accrochés aux valeurs véhiculées par l’opinion publique, mue par le strass et la servilité. Le mais est commode pour les hypocrites, ceux qui souhaitent manger à tous les râteliers.


            

Et c’est ainsi que des plumitifs de l’époque esquivent les coups. Le vide intellectuel a corrompu même la volonté de défendre ses idées, aussi creuses soient elles, devant un cercle. On s’échappe avec des mais.


            

 

Je comprends mais je ne cautionne pas

 

Que fais-tu donc, c****** ?

 

J’avoue que tu as raison mais tu as tort de dire que


            

Nous reconnaissons facilement le pleutre dans un débat au nombre de mais qui parsème son discours. Belle attitude de rester « mesuré »; comme si la vérité se trouvait toujours au milieu. C’est l’idéologie du moment; ni de gauche, ni de droite, du centre. Ni homme, ni femme, juste femmelette. Ni putes, ni soumises, simplement vendues au marché. C’est l’époque et son cortège de nuances.

Soyez nuancés, les règles de vie en communauté l’exigent ! Et à force de mesure, de tempérance, on en arrive à des discours vides, sans forme ni fonds, sans aucune force sinon celle de l’émotion, l’autre opium du moment.

Le mais tire vers le bas car l’énonciation d’idées est réduite à sa plus simple expression : l’énonciation. Aucun développement n’est toléré. Développer, c’est provoquer. Provoquer, c’est pas bien.

 

Radical ! Vous êtes radical !

Vous n’êtes pas sérieux, enfin !


            

Ainsi, provocateur est synonyme d’extrémiste, intolérant, agité, fauteur de troubles, agressif. Le mot a perdu sa connotation positive, subversive pour devenir une injure.   Mais. 4 lettres qui offrent à son utilisateur un bouclier envers l’hallali général.   A chaque confrontation, il suffit de préparer ses mais. L’argumentation, la rationalité, le raisonnement, rien à cirer ! Pratique. Mais vous sortira toujours des emmerdes. Efficace.     Mais, la dernière balle du shérif.


            

A la base, mais est juste une conjonction de coordination en français. Selon wiki;

En grammaire, une conjonction de coordination est une catégorie grammaticale désignant un mot-outil invariable, établissant une relation de coordination entre deux éléments (deux mots, deux syntagmes, deux propositions, ou même, deux phrases), de même nature, et surtout, de même fonction syntaxique.

 

 

Dans le débat, c’est désormais une conjonction d’annulation. Lorsqu’ils mettent le mais, ils activent le cran de sureté. Il leur suffit de citer un contre-exemple, en général modique, une expérience heureuse dans un océan de lamentations, pour annuler l’argumentation de leur contradicteur. Seulement, ils n’apportent aucune contre-argumentation. La démonstration est déjà faite. Ils ont mis le mais donc protégés, ils ont donné les gages. Vous êtes K-O debout.

Le mais évite les procès, les injures, les agressions, les disparitions. Mais, la plus belle invention de la langue française après je m’excuse. Mais, le protège-co****** idéal.

Conséquence de cet état de fait, tous les parcimonieux du mais sont des extrémistes, égorgeurs de sentimentalisme niais et de bonnes belles valeurs communes. Anti-mais, vous êtes catégorique, borné, illuminé, prétentieux, vaniteux, puéril, original…


            

Sur la courbe de Gauss, vous êtes encore au pied de la cloche. Et ça, c’est dangereux dans ce temple de la convenance, de la mesure, de la compréhension, de l’entregent qu’est devenu le débat public. Nous sommes tous devenus ambassadeurs, de l’intérêt général. Négocier, parlementer, entendre, accepter sans rejeter, rejeter sans choquer, ménager … Mimétisme abêtissant.


            

Et le verbe s’est étiolé en des suites continues de mais. Il y’ a tellement de personnes dites savantes dont nous ne savons plus ce qu’elles pensent ! Des inconditionnels du mais. Des trouillards qui s’ignorent.


            

Ne soyez pas nuancé: soyez laid !

 

 

 

Osez le bon sens !

YDM

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