[UAH] Léopold Senghor (1906-2001)

Léopold Senghor est né en 1906 à Joal Sénégal.

Contrairement à l’image qu’une certaine France, paternaliste et coloniale, a bien voulu lui construire, il est loin d’être un surdoué puisque ce n’est qu’à l’âge avancé de 22 ans – où d’autres sont déjà agrégés – qu’il est enfin bachelier et admis, grâce à l’intervention de Blaise Diagne, à préparer le concours de l’École normale supérieure au lycée Louis-le-Grand, où il se liera avec Aimé Césaire et Georges Pompidou.

Malgré ses ambitions, Senghor échouera au concours, de même qu’il sera refusé à l’École normale de Saint-Cloud (depuis ENS de Lyon).

Il se consolera avec l’agrégation de Grammaire, à laquelle il ne sera admis qu’en 1935, à près de 30 ans (après avoir échoué une première fois). Pour concourir, Senghor devra solliciter la nationalité française, n’étant jusque là qu’un « indigène ». Le rapport du CAI, service de renseignement du ministère des Colonies, lui étant favorable, il l’obtiendra et il en sera, toute sa vie, reconnaissant.

On est donc extrêmement loin de l’image du « brillant » normalien. Senghor n’a jamais été reçu à Normale, ce qui serait sans importance s’il n’avait laissé dire partout que tel était le cas. Après avoir entamé une carrière de professeur de lycée, il est mobilisé en 1939 et fait prisonnier l’année suivante. Chance rare, il échappe non seulement à l’exécution sommaire généralement réservée aux tirailleurs dont il faisait partie, mais également aux camps d’outre Rhin, puisqu’après un séjour dans un camp disciplinaire des Landes, les Allemands le libèrent en 1942 pour « raisons de santé ».

Il se déclarera par la suite « ancien résistant » pour avoir participé au front national universitaire.

Après une période « communiste », après guerre, puis « socialiste », Senghor est renvoyé en Afrique pour prendre – dans la perspective d’une prochaine indépendance – le contrôle du Sénégal. Elu député, il entre aux gouvernements Edgar Faure puis Michel Debré.

En 1960, Senghor devient, comme prévu, président du Sénégal. Il le restera pendant 20 ans, passant une bonne partie de son temps en France, dans sa propriété de Normandie (il avait épousé une Française en secondes noces).

Senghor s’est distingué par une servilité peu commune à l’égard de l’ancien État colonial que son amitié avec Georges Pompidou, devenu président de la République française en 1972, ne suffit pas à expliquer.

Placé de fait sous les ordres de Jacques Foccart, qui lui imposera, comme ministres, des personnages aussi peu recommandables que la barbouze Jean Collin, Senghor se pliera à toutes les dérives. Elles aboutiront à la « mort suspecte »  et déshonorante du jeune Omar Blondin Diop et à l’incarcération de Mamadou Dia , rival de Senghor et hostile à la politique de soumission à la France.

Senghor a laissé un corpus poétique dont on retiendra surtout l’obsession de la « race » et de la couleur de peau – sous couvert de négritude – le caractère ampoulé, l’affirmation de l’infériorité de l’Africain, simple « joueur de batterie » dans un concert dont le chef d’orchestre sera toujours le « blanc » comme l’a très justement fait remarquer Stanislas Adotevi.  Senghor, affirmant que l’ »émotion » est nègre tandis que la raison serait « héllène » a suffisamment servi la cause du racisme et du colonialisme pour que les portes de l’Académie française s’ouvrent à lui le 2 juin 1983 et qu’on le recouvre de toutes les décorations françaises possible.

Mais ni Jacques Chirac, président de la République, ni Lionel Jospin, Premier ministre – pour des raisons probablement différentes – ne jugèrent utiles de se déplacer pour les obsèques du meilleur ami africain de la France, en décembre 2001.

 

 

 

Article du site Une Autre Histoire

 

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