Pimp, Mémoires d'un maquereau d'Iceberg Slim

Premier volet de la trilogie d’Iceberg SlimPimp raconte l’histoire d’un jeune noir qui essaie de s’en sortir dans la vie en faisant tapiner des filles. Robert Beck de son nom, a été l’un des proxénètes les plus célèbres de Chicago dans les années 50, réputé pour sa violence. Il raconte son évolution dans ce milieu de requins, de ses débuts laborieux jusqu’à sa chute finale.

Le langage est riche, le style est sans fioritures, sans concession. La violence envers les femmes, les trahisons, la concurrence des macs, la profusion de drogues, de corruption, mettent en lumière le Chicago des bas-fonds, des pauvres, des noirs, des exclus. C’est une étude presque sociologique du ghetto noir dans les grandes villes américaines dans les années 50.

Selon moi, les prétextes assez commodes qu’il utilise, à savoir sa mère volage et son viol par une voisine, pour justifier son attitude misogyne sont assez fumeux. C’est simplement un jeune noir vivant dans les années 40 qui s’est rendu compte qu’il n’avait aucune perspective de progrès social pour lui dans cette Amérique  blanche, raciste et ségrégationniste et qui a usé de tous les moyens pour y arriver. D’ailleurs, il s’essaie au début de ses aventures dans rues malfamées de Chicago à des escroqueries avec des complices. C’est quand il se rend compte que d’avoir des filles sur le trottoir est moins dangereux, plus rémunérateur et valorisant ( »belles voitures, beaux habits, respect des autres hommes noires et même des blancs qui ont besoin de s’encanailler avec ses filles »), qu’il décide à tout prix de monter sa petite affaire et de se former auprès du meilleur mac de la ville pour encadrer son harem. Et il finira par exceller dans son art. Dans ses pérégrinations ténébreuses, il se frotte dangereusement à la drogue, à la prison, à la nature profondément inhumaine des hommes. C’est l’histoire d’un type qui a refusé d’être un noir parmi tant d’autres et qui a pris son destin en main; certes dans une voie assez glauque, mais il avait aussi soif de réussites et de réussite sociale que certains de ces nouveaux cols blancs qui prospèrent avec la même hargne sur notre ignorance. En tout cas, c’est captivant, instructif et très bien écrit.

Écoute, Preston, dis-je. J’ai quelque chose dans le ventre, je suis pas une gonzesse. J’ai été deux fois en taule, c’était dur, mais j’ai bien tenu le coup. Je suis sûr que ma pute m’aime à sa manière.  Et je suis sûr que je la tiens bien. Si je me trompe et qu’elle se barre, qu’est-ce que  ça peut foutre ? Quoi qu’il arrive, je ne laisserai pas tomber. Même si je deviens aveugle, je continuerai à faire le mac. Et si on me coupe les jambes, j’irai chercher des putes dans ma chaise roulante. Je serais mac ou j’en crèverai. Je n’ai pas l’intention de devenir le larbin chez les Blancs. Tu pourras dire ce que tu voudras, tu n’arriveras pas à me dégoûter de faire tapiner des putes dans cette ville. Je suis capable de prendre ma part sur le marché du cul, ça, je le sais. Et ce que je ne sais pas encore, je vais l’apprendre. Sweet ne me fais pas peur. Je vais le rencontrer et lui soutirer tous les tuyaux que je pourrai, je lui boufferai le cerveau comme un vautour.

Page 134, Pimp

C’est un livre magnifique, une tuerie, qui devrait être distribué à tous les jeunes de nos quartiers qui tiennent les murs et fantasment la violence et le monde des caïds.

Robert Beck décrit sa vie, son époque, sa communauté et sa ville avec une telle minutie et une telle qualité d’écriture qu’il arrive à rendre belle la plus sordide des âmes. Si vous voulez savoir comment était la vie d’un nègre aux USA dans les années 40 et quels chemins lui étaient assignés, plongez-vous dans cette expérience, très personnelle mais ô combien commune à la plupart des noirs d’Amérique. C’est l’Amérique vue de l’enfer.

Et maintenant, écoute-moi bien, espèce de petit connard, s’écria-t-il. Tu sais pourquoi cette pute est venue t’emmerder ? C’est parce que tu passes ton temps à sourire comme un chat du Cheshire ! Qu’est-ce qu’il y a de si drôle ? Il n’y a donc pas moyen de te débarrasser du gogo qui est en toi ? Comment veux-tu que je fasse de toi un mac d’une gonzesse dans ton genre ? Je te l’ai déjà dit une fois, combien de temps faudra-t-il que je le répète ? Espèce de petit morveux de nègre, pour être un bon mac, il faut être glacial, aussi froid que la chatte d’une pute morte. Maintenant, si tu es une pétasse, une tantouze ou je ne sais quoi, dis-le-moi, je t’habillerai en travelo et je te ferai tapiner pour moi. Tant que tu n’auras pas effacé de ta figure ce sourire de cave, je ne veux plus te voir !

Page 223, Pimp

Je l’ai inscrit dans notre chaîne de lecture.

Osez le bon sens !

YDM

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