Le ghetto hype

Ils arrivent. Avec leurs jeans slim, leur sourire hypocrite et leur cabas d’écolos citadins, ils inondent nos ghettos comme des einsatzgruppen, paradent devant nos misères avec la larme à l’œil et le portefeuille siglé pour récupérer le moindre mètre carré disponible. La banlieue est devenue hype, de plus en plus drive-in, comme le fion d’un empapaouté du Marais. Les hipsters aboient et les prix croissent. Leur seule contribution à la pacification des esprits et des communautés républicaines; leurs barbes de bûcherons qui font passer les frères mumus les plus fanatiques pour des ados imitateurs et craintifs. On aura au moins échapper à une loi contre la barbe islamique. Merci, Têtu !

Et au loin, on entend ces putains de chèvres hébétées dans la France des profondices qui bêlent au grand remplacement, alors qu’il suffirait d’un autre feu de joie rageuse, pour que la lumière soit dans leurs bulbes empoussiérés et qu’ils se rendent compte que Seine-Saint-Denis blanchit à tout bout de ciment. Les intellos éclairés appellent ça, la gentrification. Paris étant une lorette d’un âge certain pour retraités américains, enturbannés dépravés, oligarques désinhibés; la maraille est priée à coups d’augmentations insensées de loyers, d’aller voir dans l’arrière-pays d’Ile-de-France, si l’herbe est moins sèche. Dans cette guerre moderne qui ne dit pas son nom, point de GI, point de Spitfire, juste quelques larmes étouffées et d’obscènes déportations.

 

Ceux-là même qui vomissaient cette muraille de racailles arriérées programmées pour déferler sur leur temple de la délectation, sont désormais des prédateurs avisés. La Plaine-Saint-Denis, Aubervilliers, Pantin, Le Pré-St-Gervais…, la petite couronne fait le bonheur des gentilshommes. Ils sont là, avec leurs fripes de marque, leurs Feiyue défraîchis, dégueulasses, leur allure rachitique et leurs volumineux chéquiers. L’invasion sera brutale, massive, efficace. Les prémices sont révélatrices. Si l’on rayait les Francs-moisins de la carte dyonisienne, la ville pourrait aisément s’appeler Clamart ou Montrouge. La débougnolisation, la dépetitblanchisation et la dénégréification du 93 sont enclenchées. Et personne ne défendra la populace.

Débarque une nouvelle race : les jeunes riches, pas assez pour rester dans le cocon, plus qu’assez pour coloniser l’enveloppe, sûrs de leur fait, surprotégés, dégourdis du torse, sournois comme requin. La loi du marché, la fameuse, est une vérité contemporaine qui ne souffre d’aucune contestation. Les Huns, retirez-vous !

Alors, on se tire, baisés jusque dans ses plus légitimes espoirs. L’exode citadin, la nouvelle création de la mondialisation heureuse.

 

Paie ton café bio ! Paie ton essence verte ! Paie ton loft écolo ! Paie ton humanisme profitable ! Paie ton commerce équitable ! Paie ton sauvetage des rhinocéros d’Afrique !

Mais quand il s’agit de bousiller la vie du voisin miséreux: sorry, just business, not personal ! Et les voilà qui s’approchent, l’air de dire : « eh mon cher crépu que j’adore regarder danser, j’emménage ! » C’est beau, comme un pédophile repenti.  A croire que dans ces îlots radieux de la meilleure rombière de France, le multiculturalisme si honni a parfois du bon. Du bon, tant qu’il n’a de multiculturel que le souvenir fantasmé d’un passé crapuleux. La noirceur sans le noir. l’arabité sans l’arabe. La pauvreté sans le pauvre. Cool ! Les banlieues sont de bonnes vieilles pierres. On en est là ! Quand il y’ a un gros billet à faire, le bush séduit. Les indigènes doivent se crédibiliser ou déguerpir, en attendant que La Courneuve, devenue nouvelle lisière entre la vie et les ennuis, se hypise. La banlieue s’embourgeoise, les banlieusards s’éloignent. Les riches arrivent, courrez ! Schnell, bitte !

 

Osez le bon sens !
YDM

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