La « lettre à un ami antisioniste » de Martin Luther King est un faux du rabbin orthodoxe Marc Schneier

Afin d’apporter plus de lumière au précédent article traduit de MadameNoire portant sur le conflit palestinien, que je me suis permis de reproduire sur B.I., j’ai retrouvé un article d’un internaute plutôt curieux qui a fait le boulot de démontrer que la lettre pro-sioniste de Martin Luther King était un faux.

Aussi, je me permets une fois de plus, de relayer le travail de Tohey, afin que vous ayez tous les éléments pour vous faire une opinion.

 

 

Martin Luther King : « lettre à un ami antisioniste » ou « fausse lettre d’un ami sioniste » ?

Publié le 01/02/2009 sur le Post

 

De manière empirique, en excluant toute donnée idéologique sioniste ou autre, il est juste d’affirmer que la création de l’État d’Israël est née sur deux terribles malheurs antagonistes, celui des juifs d’Europe, rescapés d’un holocauste, en quête de paix et de sécurité bien méritée contre celui des arabes de Palestine contraints d’abandonner, sans espoir de retour, cette terre ancestrale qui était la leur[3]. Ainsi, comment se fait-il qu’un homme de paix profondément humain comme l’était à n’en jamais douter Martin Luther King puisse ignorer l’injuste expulsion de trois quarts de million d’arabes innocents dans un texte où il parle de « l’idéal du peuple juif de retourner vivre sur sa propre terre » ?

Au regard de cet incompréhensible oubli et des méthodes du posteur à l’origine de ma réflexion, des méthodes qui procèdent, soit de la malhonnêteté, soit de l’obstination dans l’erreur ou tout simplement d’un copié/collé hâtif, je fus pris d’une certitude : cette lettre est tronquée ou elle est retirée de son contexte. Après de longues recherches sur la toile et sur des sites pas toujours en français, j’en viens à lever le mystère du titre de ce billet.

La « lettre à un ami antisioniste » n’existe pas. C’est une invention, un faux dans ce qu’il y a de plus absolu.

La chronique des faussaires : premier acte

Tim Wise [4] est un écrivain américain juif, militant antiraciste et directeur de l’Association pour une éducation blanche antiraciste (Association for White Anti-Racist Education -AWARE).

Dans son essai publié le 20 janvier 2003 sur l’e-magazine Zmag et intitulé « Une fraude de l’envergure d’un roi : Israël, le sionisme et la falsification des propos de Martin Luther King [5]», l’auteur explique « la seule chose à laquelle je n’aurais jamais pu m’attendre, de la part de quiconque, c’est que l’on vienne inventer une citation de King ; une citation qu’il n’a, tout simplement, jamais faite, et prétendre qu’elle provient d’une lettre qu’il n’a jamais écrite, et qui aurait été publiée dans un recueil de ses essais qui n’a jamais existé. Franchement, un tel niveau de tromperie a vraiment quelque chose de spécial ».

Tim Wise fait donc allusion à ce faux qui circule sur internet depuis maintenant une dizaine d’années et dont le titre original est « Letter to an Anti-Zionist Friend». Il établira avec d’autres les origines de cette contrefaçon.

 

L’origine du faux

 

Le scripteur du faux attribué à MLK est le rabbin orthodoxe new-yorkais, Marc Schneier [6]. Dans son ouvrage publié en novembre 1999 « Rêves partagés : Martin Luther King Jr. et la communauté juive [7] », l’auteur cite cette lettre pour la première fois. En découvrant ce texte « inédit », Tim Wise remarque que « la lettre était [par ailleurs], remplie de fautes de grammaire que tout lecteur à demi cultivé des œuvres de Martin Luther King aurait trouvée étrangères à son style et à sa manière d’écrire ».

 

Après ce premier constat, Wise s’est intéressé aux références de la prétendue lettre citées dans le livre du rabbin, il relève deux sources : l’écrit aurait été publié à la page 76 du numéro d’août 1967 de la Saturday Review et il figurerait également dans l’anthologie des œuvres de King intitulée « Ce que je crois : morceaux choisis des écrits du Dr. Martin Luther King Jr ». Concernant la fameuse anthologie, elle n’existe simplement pas [8]. Quant à la Saturday Review, Tim Wise démontre qu’« elle n’a existé qu’en quatre livraisons, en août 1967. Deux de ces quatre numéros, seulement, comportent une page 76. Une des deux pages 76 comporte des petites annonces et l’autre comporte une critique de l’album des Beatles parue sous le titre « Sergeant Pepper ». Pas plus de lettre de MLK que de beurre en branche ».

 

Les conséquences de la duperie

 

Le texte faussement attribué au révérend King, établit un fait : critiquer le sionisme équivaut à de l’antisémitisme. Pour illustrer ce principe, le ou les auteurs de la falsification n’hésitent pas à faire un rapprochement entre ceux qui critiquent le nationalisme juif tel qu’il est incarné par Israël, et ceux qui refusent de reconnaître des droits aux noirs. Ce postulat emporte quelques conséquences.

 

La plus absurde intéresse les personnalités juives qui réprouvent les excès de l’idéologie sioniste. En effet, prétendre que Stéphane Hessel, Ronny Brauman, Tim Wise et tant d’autres entendent en réalité attaquer les juifs, lorsqu’ils dénoncent Israël et le sionisme, relève du ridicule.

 

Une autre conséquence irrespectueuse celle-là affecte le legs de Martin Luther King. Un noble héritage pour lequel la décence devrait interdire tout bidouillage au service d’agendas idéologiques, qui sont sans lien avec l’homme et qu’il n’aurait surement pas cautionnés.

 

Le plus dramatique dans tout cela, ….

 

 

Lire la suite sur le blog de Tohey

 

 

 

 La lettre contrefaite par le rabbin Marc Schneier

 

« . . . You declare, my friend, that you do not hate the Jews, you are merely ‘anti-Zionist.’ And I say, let the truth ring forth from the high mountain tops, let it echo through the valleys of God’s green earth: When people criticize Zionism, they mean Jews–this is God’s own truth.

« Antisemitism, the hatred of the Jewish people, has been and remains a blot on the soul of mankind. In this we are in full agreement. So know also this: anti-Zionist is inherently antisemitic, and ever will be so.

« Why is this? You know that Zionism is nothing less than the dream and ideal of the Jewish people returning to live in their own land. The Jewish people, the Scriptures tell us, once enjoyed a flourishing Commonwealth in the Holy Land. From this they were expelled by the Roman tyrant, the same Romans who cruelly murdered Our Lord. Driven from their homeland, their nation in ashes, forced to wander the globe, the Jewish people time and again suffered the lash of whichever tyrant happened to rule over them.

« The Negro people, my friend, know what it is to suffer the torment of tyranny under rulers not of our choosing. Our brothers in Africa have begged, pleaded, requested–DEMANDED the recognition and realization of our inborn right to live in peace under our own sovereignty in our own country.

« How easy it should be, for anyone who holds dear this inalienable right of all mankind, to understand and support the right of the Jewish People to live in their ancient Land of Israel. All men of good will exult in the fulfilment of God’s promise, that his People should return in joy to rebuild their plundered land.

This is Zionism, nothing more, nothing less.

« And what is anti-Zionist? It is the denial to the Jewish people of a fundamental right that we justly claim for the people of Africa and freely accord all other nations of the Globe. It is discrimination against Jews, my friend, because they are Jews. In short, it is antisemitism.

« The antisemite rejoices at any opportunity to vent his malice. The times have made it unpopular, in the West, to proclaim openly a hatred of the Jews. This being the case, the antisemite must constantly seek new forms and forums for his poison. How he must revel in the new masquerade! He does not hate the Jews, he is just ‘anti-Zionist’!

« My friend, I do not accuse you of deliberate antisemitism. I know you feel, as I do, a deep love of truth and justice and a revulsion for racism, prejudice, and discrimination. But I know you have been misled–as others have been–into thinking you can be ‘anti-Zionist’ and yet remain true to these heartfelt principles that you and I share.

Let my words echo in the depths of your soul: When people criticize Zionism, they mean Jews–make no mistake about it. »

 

From M.L. King Jr., « Letter to an Anti-Zionist Friend, » Saturday Review_XLVII (Aug. 1967), p. 76.
Reprinted in M.L. King Jr., « This I Believe: Selections from the Writings of Dr. Martin Luther King Jr. »

 

 

 

Traduction trouvée sur le site juif.org

« …Tu déclares, mon ami, que tu ne hais pas les Juifs, que tu es seulement antisioniste. A cela je dis, que la vérité sonne du sommet de la haute montagne, que ses échos résonnent dans les vallées vertes de la terre de Dieu : Quand des gens critiquent le sionisme, ils pensent Juifs, et ceci est la vérité même de Dieu.  » L’antisémitisme, la haine envers le peuple juif, a été et reste une  tache sur l’âme de l’humanité. Nous sommes pleinement d’accord sur ce point. Alors sache aussi cela : antisioniste signifie de manière inhérente antisémite, et il en sera toujours ainsi.

Pourquoi en est-il ainsi? Tu sais que le Sionisme n’est rien moins que le rêve et l’idéal du peuple juif de retourner vivre sur sa propre terre. Le peuple juif, nous disent les Ecritures, vécut en union florissante sur la Terre Sainte, sa patrie. Ils en furent expulsés par le tyran de Rome, les mêmes Romains qui assassinèrent si cruellement Notre Seigneur. Chassé de sa patrie, sa nation en cendres, le peuple juif fut forcé d’errer sur le globe. Encore et encore, le peuple juif souffrit aux mains de chaque tyran qui vint à régner sur lui.

« Le peuple noir, sait, mon ami, ce que signifie souffrir les tourments de la tyrannie, sous un joug que l’on n’a pas choisi. Nos frères en Afrique ont supplié, plaidé, demandé, EXIGÉ la reconnaissance et la réalisation de leur droit naturel de vivre en paix sous leur propre souveraineté, dans leur propre pays. Pour quiconque chérit ce droit inaliénable de toute l’humanité, il devrait être si facile de comprendre, de soutenir le droit du Peuple Juif à vivre sur l’antique Terre d’Israël. Tous les hommes de bonne volonté se réjouiront de la réalisation de la promesse de dieu, que son Peuple retourne dans la joie sur la terre qui lui a été volée. C’est cela le Sionisme, rien de plus, rien de moins. 

Et qu’est l’antisionisme ? C’est le déni au peuple juif d’un droit fondamental que nous réclamons à juste titre pour le peuple d’Afrique et accordons librement à toutes les nations de la terre. C’est de la discrimination envers les Juifs, mon ami, parce qu’ils sont Juifs. En un
mot, c’est de l’antisémitisme. L’antisémite se réjouit de chaque occasion qui lui est donnée d’exprimer sa malveillance. L’époque a rendu impopulaire, à l’Ouest, de proclamer ouvertement sa haine des Juifs. Ceci étant le cas, l’antisémite doit à chaque fois inventer de nouvelles formes et de nouveaux forums pour son poison. Combien il doit se réjouir de la nouvelle mascarade! Il ne hait pas les Juifs, il est seulement antisioniste.  

Mon ami, je ne t’accuse pas d’antisémitisme délibéré. Je sais que tu ressens, comme je le fais, un profond amour pour la vérité et la justice, et une révulsion envers le racisme, les préjugés, la discrimination. Mais je sais que tu as été trompé, comme d’autres l’ont été, en te faisant croire que tu pouvais être antisioniste tout en restant fidèle aux principes que nous partageons toi et moi du fond du cœur. Que mes paroles sonnent dans les profondeurs de ton âme :quand les gens critiquent le sionisme, ne te trompe pas, ils pensent les Juifs. « 

 

 

Qui est Rabbi Marc Schneier, le faussaire ?

rms_headshot_2007Marc Schneier est un rabbin américain, fondateur et président de la The Foundation for Ethnic Understanding (Fondation pour la compréhension ethnique), et le rabbin fondateur de la synagogue de Hampton à Westhampton Beach, New York et de la New York Synagogue à Manhattan.

Diplômé de l’Université Yeshiva, Schneier est positionné comme le 37e rabbin le plus influent des USA sur 50 par Newsweek magazine en 2007, et comme l’un des juifs les plus importants des Etats-Unis par Forward. Avocat de la tolérance et de la bonne entente entre les différentes ethnies, il a été honoré par le Congrès américain ainsi que l’Etat d’Israël, et est un récipiendaire du prix oecuménique Kelly Miller Smith de la Southern Christian Leadership Conference, le prix Martin Luther King « Measure of a Man » de la NAACP, la médaille d’honneur d’Ellis Island, le prix Civil Rights Leadership de Martin Luther King, Jr., la médaille de New York Martin Luther King, Jr., et le prix de l’American Civil Rights Education Services Civil Rights.

Schneier est un ancien vice-president du Congrès Juif mondial et un ancien président du Bureau des rabbins d’Amérique du nord et de New York, ainsi que membre du conseil d’administration de nombreuses organisations et de nombreux comités. Il est le fils du rabbin Arthur Schneier, fondateur de l’ONG, the Appeal of Conscience Foundation. (la fondation pour l’appel à la conscience dont le but est aussi la bonne entente entre les religions, la promotion de la paix, de la tolérance et la résolution des conflits ethniques. Cette ONG a remis un prix « d’homme d’État de l’année » en 2013 au président indonésien Susilo Bambang Yudhoyono, qui n’a jamais brillé pour avoir protégé les minorités religieuses dans son pays.)

 Schneier a beaucoup écrit sur le dialogue interreligieux, et est un invité régulier des plateaux télés et radios américains. Il est l’auteur de Shared Dreams, un livre sur les relations entre Martin Luther King et la communauté juive pendant l’époque des mouvements de droits civiques aux USA. Co-fondateur du the Foundation for Ethnic Understanding (fondation pour la bonne entente ethnique) avec Joseph Papp dont une chaire est détenue par Russell Simmons, le magnat du Hip Hop. Il produit un guide étudiant distribué à des milliers d’étudiants juifs et noirs dans des centaines de lycées et collèges aux USA.

En 2010, il était l’un des invités phares à la conférence de Doha au Qatar sur le dialogue interreligieux. En 2011, il fut le premier rabbin à être reçu à Bahrein par le roi Hamad bin Isa Al Khalifa.

 

Traduit de sa page anglaise Wiki

 

 

Osez le bon sens !

YDM

 

Be the first to comment on "La « lettre à un ami antisioniste » de Martin Luther King est un faux du rabbin orthodoxe Marc Schneier"

Leave a comment