Esclavage et réparations de Louis-George Tin

Voici un livret qui plaide avec brio pour la réparation des crimes de l’esclavage par l’État français; un joli plaidoyer pour la mendicité. Louis-George Tin est l’actuel président du CRAN, cette chose qui prétend parler au nom des noirs de France. Et fondateur de la journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie. El a rédigé ce livre pour justifier son combat : la réparation des crimes de l’esclavage. Ah, j’allais oublier, el est normalien.

Honnêtement, l’argumentation se tient et personne ne peut réfuter le fait central que la justice, de tout temps, a réparé les fautes des personnes incriminées. Ainsi, apprendrez-vous qu’en fait, la loi Taubira était faite dans ce but précis.

Qu’en est-il en France ? Dans sa version initiale, la loi Taubira, votée en 2001, comportait un article sur les réparations relatives à l’esclavage, mais il a été écarté en commission des lois. Ce fait important a longtemps été ignoré, pour ne pas dire occulté. Page 10

Tin compare la situation des réparations en France et aux USA. c’est riche d’enseignements sur l’histoire des noirs et l’on comprend que des noms prestigieux, ont de tout temps, souhaité des réparations pour l’esclavage. Pour simplifier, en France, l’État a indemnisé les propriétaires d’esclaves et aux USA, différents États ont indemnisé (voulu indemniser serait plus juste, car ils n’y sont pas arrivés à cause des blocages politiques notamment dans les États sudistes) les esclaves.

L’on apprend qu’Haïti a dû payer 150 millions de francs destiné à indemniser les anciens colons. Cette somme correspondrait à 21 milliards d’euros. El met en lumière l’évolution de Frantz Fanon, d’abord opposé aux réparations et puis convaincu par le lien entre Shoah et colonisation :

Puisque l’Allemagne doit payer pour le génocide, la France aussi doit payer pour la Colonisation. Page 34.

 

L’histoire américaine est beaucoup plus riche de rebondissements, d’héros discrets, d’avancées sur la compensation. C’est édifiant et ne serait-ce que pour ces premières parties, le livre mérite d’être lu et connu par les noirs.

 

Les vraies difficultés commencent avec la partie III Penser la réparation où l’auteur égrène les arguments en faveur de son combat; la réparation, le fondement de la justice, la France qui a elle-même demandée des réparations après la première guerre mondiale, les indiens d’Amérique et les japonais-américains compensés, les réparations de l’Allemagne envers les juifs… Tin soulève des objections et apportent des contre-argumentations qui me paraissent cohérentes, comme dans le cas de la temporalité des faits.

Certaines personnes, en effet, estiment que les réparations auraient été légitimes pour les esclaves, ou pour leurs familles, à l’époque; mais, disent-elles, cent cinquante ans après l’abolition de l’esclavage, cette revendication serait bien trop tardives… page 100

Ou encore le fait qu’il soit anachronique de juger le passé avec les critères moraux du présent.

 

 

Ma vision est que cette quête de réparations effrénée est une forme de mendicité tolérée par les lois actuelles qui rendent imprescriptibles les génocides. Si je suis contre la réparation, ce n’est pas par ce que je crois qu’elle n’est pas légitime pour les peuples noirs; mais tout simplement parce que je crois qu’elle n’est qu’une énième incapacité de nos peuples à transcender leurs souffrances, leurs colères, leurs douleurs, et une volonté délibérée de rendre responsables de notre désarroi les colons. Je crois qu’il est vital pour nous de passer à autre chose, de cesser de chialer à la réparation et de se prendre en main.

Je ne suis pas un mendiant. Et nous nous grandirons à ne pas être toujours en position d’attente, de quémande, d’aller demander au blanc, aux tribunaux, de bien vouloir nous donner quelques arachides pour la souffrance et l’infamie qu’ont vécues nos ancêtres.

 

Sur le temps, cela fait maintenant 400 ans que l’esclavage est notre fardeau et je l’avoue, je refuse de faire commerce de cette ignominie. S’il existe des peuples qui se sont abaissés à quêter, c’est leur problème et pas le mien. Je refuse d’être associé à cet argent sale de quelque façon que ce soit. Oui, la rationalité n’est pas tout et ma limite est bel et bien de rester engoncé dans la supplique.

Cela nous entraînera irrémédiablement vers l’abject. S’ils doivent payer, il faudra marchander, nécessairement. Les Antilles, l’éducation de vos parents, vos enfants, votre présence noire sur notre sol blanc : vous l’estimez à combien ? Car avec une telle vision, les bons côtés de l’esclavage prennent tout leur sens. Nous voulons bien raquer mais vous aussi, vous devrez rembourser.

Les faux arguments sur la femme violée, très imagés sont émotifs, le parallèle ne peut être soutenu. Je n’ai pas été violé. Je ne suis pas un esclave, jusqu’à preuve du contraire. Mes ancêtres l’étaient. Ils se sont battus en leur temps pour se libérer et demander des réparations; ils ont perdu. Ce n’est pas à moi 150 ans plus tard, de m’arroger leurs souffrances pour quelques cacahouètes. Je vais dire les choses comme je les pense réellement: l’enculade est passée; il faut digérer la frappe comme on dit au Cameroun, et se reconstruire.

Comme a si bien confessé Jean-Marie Bigard, quand on t’encule, ne bouge pas ! Sinon, tu fais jouir le mec derrière toi (el devrait le comprendre, ça !)

 

Aussi blessant que cela puisse être, nous nous sommes faits avoir, pendant longtemps, très longtemps et nous continuons à nous faire avoir. Les réparations ne soigneront pas nos douleurs, nos névroses et je n’ai pas besoin du marche-pied d’un descendant d’un colon (et les métis, ils paient aussi ?) pour avancer dans la vie.

Je ne demande rien à personne malgré toutes les belles justifications rationnelles car je pense que ma dignité est bien plus importante que ces arachides. Vous n’avez pas à forcer les gens à vous aimer. Soyez dignes. Et puisque la France est votre projet, acceptez-la avec ses torts, ses travers, ses oublis. Comme les vendéens. C’est aussi cela l’amour, n’est-ce pas ?

 

tinEnfin, quand je vois les réparations attendues par le CRAN (Pages 131-132; fonds national de soutien aux réparations, évolutions des programmes scolaires, promotion des études supérieures, musée national de l’esclavage, production des artistes issus des DOM et colonies, rebaptême des noms de rues d’anciens colons,...), je me demande ce qu’ils foutent depuis  leur création (tout ça pour ça ?).

De la glose stérile, de la pleurniche, des procès pour actions … Forte envie de gerber.

 

Nul besoin de réparations pour que la communauté noire s’assume et se fasse respecter.

 

Je l’ai inscrit naturellement dans notre chaîne de lecture.

 

 

Osez le bon sens !

YDM

 

 

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