« Les élites se donnent de bonnes raisons pour frauder ». Entretien avec Pierre Lascoumes

Pierre Lascoumes, directeur de recherche CNRS au Centre d’études européennes (CEE) de Sciences Po

 

2 décembre 2014 – Les riches fraudent tout autant que les pauvres. Mais ils se donnent de bonnes raisons de le faire. Entretien avec Pierre Lascoumes, directeur de recherche CNRS au Centre d’études européennes (CEE) de Sciences Po. Extrait du magazine Alternatives Economiques.


Pourquoi les riches fraudent-ils ?

Pourquoi ne frauderaient-ils pas ! Le sociologue Emile Durkheim (1858-1917) expliquait déjà que chaque groupe social, les riches comme les autres, entretient un rapport particulier aux normes. Et le Hollandais Willem Adriaan Bonger (1876-1940) ajoutait que les transgressions s’expliquent par la compétition entre catégories sociales et le besoin de reconnaissance. Même les mieux dotés se sentent dans un climat de concurrence qui incite certains d’entre eux à recourir à tous les moyens pour assurer leur place. Le besoin de puissance est sans fin.

Les élites économiques qui fraudent développent tout un ensemble de « techniques de neutralisation », dites-vous, pour justifier leurs actes. De quoi s’agit-il ?

Ces analyses viennent du sociologue américain Harold Garfinkel (1917-2011), qui s’est demandé comment les jeunes délinquants justifiaient leurs actes à leurs propres yeux. Transposé aux élites délinquantes, on a mis en évidence plusieurs types de comportement du même ordre. D’abord, l’intérêt de l’entreprise justifie beaucoup de transgressions. Ensuite, celles-ci peuvent être perçues comme un comportement conforme aux normes du milieu. Enfin, l’absence de réaction ou la tolérance encouragent la fraude. Regardez les prises de position d’un Jérôme Kerviel : de son point de vue, il n’a agi que pour l’intérêt de son entreprise et parce que tout le monde autour de lui était d’accord.

 

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